Enigmes logiques et fonctions exécutives

Celui qui adorait les énigmes logiques (et celle qui subissait cette passion).

Ça fait maintenant plusieurs semaines que Didou, mon fils de huit ans, a déclaré une passion absolument dévorante pour les énigmes logiques. Personnellement, j’ai tendance à prendre cela comme un sale retour de Karma, étant donné que si tu me demandes ce qui ne me passionne pas dans la vie, a priori, je te répondrai : les énigmes logiques !

Pour autant, j’ai saisi cette occasion de lui expliquer un peu plus comment fonctionne le cerveau et je me suis dit que ça t’intéresserait peut-être toi aussi.

Les trois systèmes cognitifs

Le problème avec l’appellation énigmes « logiques », c’est que justement, ce qui paraît logique pour ton cerveau ne l’est pas! Tout dans les consignes est fait pour le piéger. Pour t’expliquer comment, je vais me référer aux systèmes cognitifs.

La première fois qu’on t’a demandé ce qui était plus léger : un kilo de plumes ou un kilo de plomb, ta première impulsion a très certainement été de te dire :
 » Mmmh, « plume », c’est plus léger que « plomb ».
Donc un kilo de plumes est plus léger qu’un kilo de plomb. »
Logique… pour ton système 1 en tout cas! Le système 1, c’est ta pensée automatique. Elle est très rapide, mais peu réfléchie, et peut donc nous induire en erreur, comme c’est le cas ici.

Pour prendre le temps d’analyser la consigne, il faudrait faire entrer en jeu le système 2. C’est un système de pensée plus réfléchi et donc plus lent. Grâce à lui, tu pourrais réaliser que le mot le plus important de cette phrase, c’est « kilos »! Ensuite, il est aisé de comprendre que 1000 grammes font 1000 grammes : que ce soit des plumes ou que ce soit du plomb, c’est la même chose.

On l’a dit, le système 2 est bien plus lent que le système 1. Alors, pour qu’il puisse entrer en jeu, il est nécessaire de faire appel à un système 3 : l’inhibition. Elle te permet de bloquer ton système 1, le temps de laisser le système 2 analyse la question plutôt que de réagir automatiquement.

C’est exactement sur ça que repose la majorité des consignes des énigmes logiques.

Les systèmes cognitifs à l’épreuve

Je vais te donner un autre exemple. Si je te dis :

« Pierre et David jouent aux échecs. Pierre gagne quatre parties, David gagne trois parties.
Pourtant, ils n’en jouent que six.
Pourquoi ? »

Alors, l’idéal, évidemment, ce serait que tu prennes le temps d’y réfléchir et que tu reviennes vérifier la réponse. Mais si tu n’as pas cette patience, je vais te mettre sur la voie.

Ton système de pensée automatique entend très certainement « Pierre et David jouent aux échecs » comme signifiant, et c’est pratiquement toujours le cas, ils jouent aux échecs ensemble. Tu ne vas donc à aucun moment te demander s’ils jouent ensemble ou pas, ça va te paraître évident, logique.

Tu vas partir sur cette voie et tu vas essayer coûte que coûte de trouver la solution à ce problème apparemment insoluble. Comment cela pourrait-il faire 6 parties en tout alors que l’un en gagne 4, l’autre 3, ce qui fait, faisait, et fera toujours 7? Peut-être qu’un des deux a triché? ou bien conteste le résultat?

Bref, tu vas faire fausse route et t’enliser.

Système 3 à la rescousse !

Par contre, si ton système 3 intervient, qu’il inhibe ta première pensée et que tu prends le temps de faire un pas de côté, tu pourras réaliser tranquillement que ce n’est pas parce qu’ils jouent aux échecs, qu’ils le font ensemble ! Ils gagnent donc bien l’un quatre parties, l’autre trois parties sur un total de six, qu’ils disputent avec un.e autre partenaire.

Voilà comment les concepteurs et conceptrices d’énigmes logiques piègent ton cerveau en utilisant les systèmes cognitifs, les fourbes!

Et la passion demeure!

Ça ne règle pas le problème de la passion dévorante de Didou, mais en attendant, plus je m’exerce, plus je crois que je parviens (peut-être) à toucher du doigt une forme de logique! Et puis, parler du cerveau, c’est toujours intéressant, non ?

A bientôt pour de nouveaux apprentissages !
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